Bénin: Médicaments de la rue,un problème de santé publique

Publié le par Luther

La problématique des médicaments de la rue est un véritable problème de santé publique dans les pays africains en général et au Bénin en particulier, si certains pays de la sous région ouest africaine en font un cheval de bataille, le problème au Bénin reste encore entier et exige une véritable politique de lutte avec mise en œuvre effective.

Allez à "Adjégounlè" au marché Dantokpa à Cotonou, au marché Arzrèkè de Parakou ou dans les plus petits villages du pays, vous trouverez partout des vendeurs de produits pharmaceutiques qui vantent les qualités de leurs marchandises, certains commerçants n’hésitent même plus, à passer de maison en maison pour les vendre. En dépit de la politique étatique de promotion des médicaments génériques dans les pharmacies agrées et dans les formations sanitaires, le commerce de ces produits pharmaceutiques ne cesse de prospérer.

Les causes de ce phénomène sont multiples (coût jugé abordable par les populations, la recherche du gain facile qui pousserait certains agents de santé à s’impliquer ou à faciliter ce commerce etc.)
Si l’origine de ces produits est incertaine, plusieurs autres raisons justifient le doute sur leur qualité, on peut citer entre autres :

L’altération des molécules due aux mauvaises conditions de stockage, de distribution et de transport, ou encore aux conditions climatiques non contrôles

Le problème de péremption des produits

L’absence d’un contrôle de qualité avant la mise en vente

Une étude réalisée dans une ville nigériane sur la qualité des gélules de tétracycline (un antibiotique très utilisé), montre qu’entre le fabricant et les étalages la biodisponibilité passe de 100 à 81% tandis que le contenu connaît une chute à 61% ( Int J. Antimicrob Agents 1995 ; 5 : 245-50). Ceci montre clairement à quel point on ne peut se fier à l’efficacité des produits de la rue. Outre leur mauvaise qualité, l’on peut décrier le mauvais usage qu’en fait la population, toute chose qui favorise la dissémination des microbes résistants surtout dans le cadre des antibiotiques dans un contexte de surveillance inadéquate. Si dans le passé l’état béninois a posé quelques actes isolés (destruction ou saisie), ceux-ci sont très sporadiques et ne sont pas de nature à enrayer le phénomène qui doit impliquer toute la population béninoise car c’est de notre santé qu’il s’agit. Interrogé il y a quelques semaines par un quotidien de la place, docteur Alfred Dansou, pharmacien Inspecteur et Directeur des Pharmacies et des médicaments au ministère de la santé affirme que « puisque le phénomène perdure, il sera procédé très bientôt à la mise en place d’un comité interministériel composé de quatre ministères que sont : le ministère des finances à travers la douane qui opèrera des fouilles minutieuses à nos frontières qui entre temps, étaient très perméables à ces médicaments ; les ministères de la justice, de l’intérieur et du commerce prendront aussi une part active dans ce comité.

Lorsque ce comité sera mis en place, nous allons dépasser l’étape de saisie et aller à l’étape d’interpellation devant les juridictions ». Mais au-delà de la mise en place d’un comité, il faudra faire appliquer rigoureusement les textes et intensifier la sensibilisation des populations sur les méfaits de ces produits tout en rendant très accessible les médicaments génériques. Les agents de santé devront également jouer une part très active dans cette lutte, leur prise de conscience effective s’avère indispensable, car certains d’entre eux indélicats n’hésitent pas à s’en procurer et les proposer aux patients au détriment des médicaments génériques disponibles dans les pharmacies des centres de santé pour le bonheur de leurs poches en toute clandestinité. En somme les médicaments de la rue constituent une véritable bombe à retardement qui nécessite une attention plus particulière au Bénin.

Parakou, le 23 juillet 2007 Docteur Soliou BADAROU
solbis1@yahoo.fr
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